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Face au Cloud nous sommes tous des homards
Nous le savons, la nasse est conçue de telle sorte que nous puissions facilement entrer alors que la sortie est plus difficile. S’il y a peu de chance que nous finissions grillés sur la table de noël, nul doute que comme le homard, nous pourrions être pris au piège.
Le cloud est appétissant : il est puissant, il a la taille que l’on recherche, on le trouve depuis n’importe quel point du globe. Il ne se trouve pas dans les fonds marins mais dans les « nuages », lui donnant un aspect intangible et immatériel donc à priori sans contraintes.
L'impact environnemental du cloud
Si nous nous intéressons à l’angle environnemental, il est loin d’être aussi virtuel. En effet, comme expliqué dans le rapport de l’Alliance Green IT (https://alliancegreenit.org/media/position-paper-le-cloud-est-il-green.pdf), le cloud s’appuie bien sur des infrastructures physiques. Celles-ci sont hyper-dimensionnées, donnant ainsi l’illusion d’une capacité infinie tout en occultant potentiellement la charge des réseaux et l’absence de décommissionnement.La puissance du cloud et ses évolutions permanentes
Sous l’angle fonctionnel, le cloud est très riche : en témoignent les centaines de fonctionnalités dans les très nombreux menus de configuration. Indépendamment de vos besoins, le fournisseur est libre de décider de la mise en œuvre de nouvelles fonctionnalités ou de la suppression d’anciennes. Cela se traduit par exemple par des messages hebdomadaires de Microsoft sur l’évolution de ses services. Ces changements sur le cloud sont susceptibles d’obliger la réalisation d’actions sur les outils tiers ou internes dans un délai décidé par le fournisseur.La dépendance technologique et les abonnements obligatoires
L'obsolescence administrative
Il est aussi possible de parler de dépendance administrative, lorsque Microsoft décide arbitrairement la fin de compatibilité entre Windows 2012 et Office 365 pro plus, une fin de support avancé pour Windows 2016 et jamais de compatibilité pour Windows 2019. De fait, les clients qui avaient récemment mis en œuvre ce type d’infrastructure auraient dû tout migrer dans le cloud, postes de travail inclus. Fort heureusement, le tollé que cela a généré a conduit Microsoft à revenir sur cette décision, pour cette fois.99,9999 % de disponibilité. Vraiment ?
En raison de la puissance financière et technologique des GAFA, nous pourrions nous attendre à une extrême disponibilité des solutions. Pourtant, nous constatons qu’il est régulièrement annoncé des pannes, certes limitées à quelques services, mais parfois nationales ou même mondiales. Est-ce alors réellement plus fiable qu’une solution justement dimensionnée et administrée sur un environnement dédié ? (Historique de pannes de services cloud sur www.downdetector.fr par exemple)La dérive de la délocalisation du support
Le cloud est virtuel, mais il est possible que son service le soit aussi. Au-delà du possible parcours de combattant à travers des FAQ inadéquates pour obtenir un contact téléphonique, il est fréquent que le support soit anglophone et délocalisé. Nous observons que de plus en plus de services commerciaux sont notamment délocalisés à l’est de l’Europe. La barrière de la langue couplée de l’absence de gestion de l’historique ou du contexte spécifique augmentent les risques d’échanges infructueux. À titre d’exemple, le service financier d’un opérateur télécom majeur (GTT) a pour consigne de ne pas communiquer avec le client et ne traite pas les litiges… fussent-ils admis comme relevant de sa responsabilité.La gestion complexe des droits et des licences
L’utilisation de services cloud induit à minima la gestion des droits d’accès avec une gestion des profils. Cela permet de distinguer les droits d’usage du droit de commander des ressources supplémentaires et donc de générer de la facturation. Pourtant certains portails (certes moins connus que ceux des GAFA) ont encore une gestion des droits qui ne permet pas au responsable de l’entreprise d’avoir une vision complète des utilisateurs habilités. Quelques fois aussi, à l’image de la migration de portail inefficiente opérée par Microfocus et qui aura duré plus d’un an lors de son rachat de HPE, il s’est avéré impossible de retrouver la trace des anciennes licences et d’assurer leur évolution malgré la fourniture des justificatifs. Ce pourrait pourtant être pire lorsque le fournisseur ne donne aucun justificatif de la nature des services commandés.
Le risque économique
Les conditions de réversibilité
Opacité des coûts, évolution des modalités de facturation et prélèvements à échoir en même temps qu’un manque de fluidité dans la relation-client : certains répondront qu’il existe des mécanismes de réversibilité et que la solution consiste à rester agile pour pouvoir changer de cloud si nécessaire. Malheureusement, la démarche est loin d’être simple. Si je veux passer de 365 à Gsuite, il y a de fortes chances que je doive passer par des fournisseurs de solutions de migration. Parfois, le piège est à peine dissimulé. C’est le cas lorsque Wunderlist (racheté par Microsoft) disparaît au profit de todo, qui propose alors une fonction d’importation… mais pas de fonction d’exportation.
Tout est d’ailleurs fait pour que les entreprises aillent de gré ou de force vers les solutions cloud à l’instar d’Oracle qui menace d’audits les clients qui ne veulent pas passer en cloud .
Vous l’aurez compris, cet article est orienté, et largement à charge contre les fournisseurs cloud. Par choix, je n’aborde pas les atouts évidents de ces solutions : qu’il s’agisse de la souplesse, de l’accessibilité, de la performance et même, quelques fois, du coût. Les articles vantant les mérites du cloud ne manquent pas. Il s’agit ici de contrebalancer un message courant et de faire prendre conscience des contraintes associées à ce type de solutions.
Le homard que nous sommes a de bonnes raisons d’apprécier le poisson frais mais il gagnerait à comprendre le fonctionnement d’une nasse.